Je vous présente aujourd'hui une histoire que j'ai écrite il y a de cela quelques années alors que j'étais étudiante au secondaire, au Collège Jean-Eudes. Je suis présentement en train de la modifier et je vais donc vous la présenter chapitre par chapitre au cours des prochains jours. Question d'entrer dans l'histoire, je vous présente maintenant le prélude ainsi que les deux premiers chapitres.
Bonne lecture!
Prélude
Le Portail
En 2025, la modernisation au Québec ne touche pas seulement les domaines de la santé et des transports, mais aussi celui de l’éducation. Les écoles ont radicalement changé. Bien sûr, les matières restent les mêmes et les professeurs enseignent toujours. Cependant, un cours en particulier subira un changement radical : l’éducation physique. Le gouvernement, qui avait augmenté les heures d’activité physique des étudiants à cinq heures par semaine, cherchait un moyen de motiver les élèves. Il fit alors appel à de nombreux chercheurs et scientifiques reconnus et ensemble, ils mirent au point un appareil plus que merveilleux : le Portail. Cette porte multidimensionnelle, utilisée pour les cours d’activité physique, permettrait de développer la force mentale et physique dans un univers complètement différent au nôtre. Avec ce portail, les élèves pouvaient aller s’entraîner dans différentes dimensions, toutes plus fictives les unes que les autres.
Les dimensions du Portail comportaient toutes des épreuves, des missions que les étudiants devaient réussir. Il existait plus de 10 000 mondes différents. Cependant, certains de ceux-ci étant dangereux, seuls les niveaux collégiaux et universitaires bénéficièrent d’un exemplaire du Portail. Il y eut de nombreuses protestations des écoles secondaires de la province, mais le gouvernement fit la sourde oreille. De toute façon, conclut-il après quelques mois, les chercheurs ne pouvaient pas produire une infinité de Portails !
Puis, cinq années plus tard, le gouvernement décida finalement de produire cinq exemplaires du Portail et de les fournir à certaines écoles secondaires qui avaient su se démarquer dans le réseau scolaire du Québec. Le Collège Jean-Eudes de Montréal fut l’un d’eux. En acceptant ainsi cet immense honneur, cette école ne savait pas que la venue de ce nouveau programme du ministère de l’Éducation allait changer la vie de trois étudiantes.
Chapitre I
Le Collège
Le Collège Jean-Eudes a changé avec les années : chaque élève possède maintenant son propre ordinateur portable, le costume est beaucoup plus moderne et l’atmosphère est chargée de l’odeur de la technologie. Par contre, comme dans toutes les autres écoles de la province, les cours sont les mêmes quoique un peu modifiés pour rencontrer les exigences de la nouvelle société. L’agora est toujours aussi remplie d’élèves et dans les corridors courent des étudiants en retard. Rien n’a changé de ce côté. Le Collège Jean-Eudes reste une école traditionnelle qui a gardé beaucoup de sa vie du début des années 2000.
Mais en ce mois de juin, la fébrilité des mois d’été commence à se faire sentir. Alors que les nuages font place au soleil et que les jours allongent, un voile d’excitation plane sur les étudiants de 5e secondaire. Dans quelques semaines, ils subiront l’examen qu’ils attendent impatiemment depuis le début de l’année : le test du Portail.
Le Collège Jean-Eudes, qui est l’un des rares établissements secondaires au Québec à posséder l’un des exemplaires du Portail, avait créé un programme révolutionnaire : à partir du secondaire 1, les jeunes élèves, en plus de pratiquer plusieurs sports durant l’année scolaire, seraient, entre autres, initiés aux arts martiaux et aux techniques d’autodéfense. Toutes les aptitudes qu’ils allaient alors acquérir leur seraient utiles lors de leur 5e secondaire. En effet, tous les étudiants qui attendraient ce niveau d’études auraient droit à un privilège énorme : passer par le Portail. Ce programme étant une première pour le Collège Jean-Eudes, les élèves qui en étaient déjà à leur fin du secondaire devaient travailler encore plus fort et apprendre le plus rapidement possible toutes les techniques requises pour l’épreuve finale de fin d’année.
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Durant les dernières semaines d’école, pour les élèves de 5e secondaire, c’était des jours de stress. Jamais ils n’auraient pensé que toute cette histoire de Portail les obséderait à ce point ! Chacun attendait avec impatience les cours d’éducation physique et tous les étudiants espéraient qu’on leur dise à l’avance quelle serait la dimension qui leur serait désignée et la mission qu’ils devraient accomplir. Ce qu’ils ne savaient pas, c’est que le tout était fait parfaitement au hasard. Les professeurs ne désignaient une épreuve à une équipe que le jour même de l’examen.
Parmi les étudiants de 5e secondaire se trouvaient trois filles plus stressées que les autres. Béatrice, Fanny et Catherine étaient inséparables et pour la première fois, depuis le 4e secondaire, elles ne porteraient plus le surnom de «Trio Infernal». Cette épreuve du Portail allait être leur dernière aventure ensemble. L’an prochain, elles seraient séparées, Béatrice et Fanny allant toutes deux au Collège André-Grasset et Catherine, quant à elle, allait étudier au Collège de Maisonneuve. Durant l’année, elles essayaient tant bien que mal de profiter de toutes les occasions qui se présentaient à elles pour se retrouver et vivre leur amitié. Malheureusement, elles savaient que les adieux seraient difficiles, puisque tout au long de l’année scolaire, elles avaient vécu toutes sortes de choses : Béatrice avait changé de vocation sportive (et cela les avait sérieusement chamboulées), Fanny avait changé de couleur de cheveux comme elle changeait de bas et Catherine faisait dépression sur dépression. Jamais elles n’avaient été aussi unies et c’est ensemble, toutes les trois, qu’elles finiraient cette dernière épreuve du «Trio Infernal».
Chapitre II
L’épreuve
La semaine des examens de fin d’année arriva brusquement aux yeux des élèves. Ils attendaient à tout moment l’heure fatidique où l’animateur de niveau viendrait annoncer aux étudiants de 5e secondaire quelle serait la journée de l’épreuve d’éducation physique. Toutes les autres matières semblaient être oubliées et les professeurs concernés émirent plusieurs plaintes à ce sujet. Cependant, personne ne pouvait freiner l’enthousiasme et l’excitation que l’examen du Portail apportait aux élèves.
Finalement, tous furent convoqués dans l’auditorium et la nouvelle sortit : l’épreuve du Portail se déroulerait lors de la dernière journée de l’année scolaire, dès que les examens de mathématique, de français et d’anglais seraient terminés. Les élèves devraient donc se présenter à la date prévue, au gymnase du collège à 7h du matin et on ne leur assignerait alors leur mission qu’une heure plus tard. Tout était enfin organisé. Il ne restait plus qu’à attendre…
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Le «Jour P», baptisé ainsi par les élèves en l’honneur du Portail, arriva enfin. Ce jour, si ordinaire fut-il, ne l’était finalement pas. Enfin, pas pour les élèves de 5e secondaire du moins. Tous s’étaient précipités vers le gymnase avant même que les portes ne s’ouvrent et plusieurs attendirent même en file pendant près d’une heure avant que l’accès ne leur soit autorisé. En moins de trente minutes, tout le monde se retrouva entassé dans la vaste pièce vivement éclairée de lumières au néon. On avait tenté tant bien que mal de ménager un cercle au centre du gymnase, là où, dans quelques instants, serait placé le Portail. Au moment où celui-ci fit son apparition, poussé par de nombreux hommes, l’assemblée des élèves se tut d’un coup. Un silence stressé s’installa et le directeur du Collège Jean-Eudes choisit cet instant pour entrer dans le gymnase, accompagné du ministre de l’Éducation, M. Claude Gélinas, et de plusieurs professeurs de l’école. Tous les yeux étaient braqués sur eux, attendant impatiemment que l’un d’eux ne prenne la parole.
- Messieurs, dames ! commença le ministre Gélinas, quelle belle journée ! Je ne serai pas long, ne vous inquiétez pas. Je sais à quel point ce jour est important pour vous et je ne le gâcherai pas avec de lourdes paroles. Vous connaissez les règles du jeu. Sans plus tarder, commençons les assignations !
Le directeur, muni d’une liste de noms se plaça alors devant les élèves et assigna les différentes missions. Les assignations avaient été faites au hasard, ne tenant pas compte du nombre de membres par équipe. La répartition se fit assez rapidement. Au fur et à mesure que les équipes recevaient leur mission, ils se réunissaient dans un coin du gymnase et commençaient déjà à réfléchir à la stratégie à adopter. Les filles du «Trio Infernal» attendaient toujours que leurs noms soient nommés. Elles furent appelées les dernières. En entendant leurs noms, elles se prirent les mains, ne remarquant pas que tous les regards étaient posés sur elles. On leur annonça froidement leur épreuve et lorsqu’elles réalisèrent l’ampleur de la mission qu’elles devaient accomplir, elles se jetèrent des regards horrifiés : elles devaient récupérer un disque de données caché dans un vaisseau infesté de monstres mangeurs d’hommes ! Elles n’eurent même pas la force ni le temps de protester qu’elles se faisaient déjà conduire vers un coin du gymnase où leurs vêtements de mission ainsi que leurs armes et leurs outils étaient déposés. Elles ne parlèrent pas durant le temps de leur préparation. Chacune enfila, dans le plus grand silence, les habits précédemment choisis pour elles. Béatrice se retrouva responsable des outils technologiques tels que le radar et le détecteur de mouvements ainsi que des communications. Elle se fit donner un pistolet, une boîte de balles et un couteau finement aiguisé. Fanny, quant à elle, était la guérisseuse. On lui fit porter un sac à dos rempli de toutes sortes de médicaments, de bandes stériles, bref, le nécessaire pour soigner tous les membres de l’équipe en cas de blessures. Elle reçut elle aussi un pistolet, des balles et un couteau. La plus surprise d’entre elles fut Catherine. Elle se demandait bien à quoi elle pourrait servir dans la mission quand on lui mit entre les mains une grosse mitrailleuse. Elle l’observa, prenant tranquillement conscience de son rôle dans l’équipe : elle était la protectrice. On lui donna aussi une carabine, un autre pistolet, des balles et un couteau qu’elle accrocha à la ceinture qui entourait sa taille.
Elles se sentaient prêtes, mais pas assez en même temps. Elles observaient, appuyées conter le mur, les autres élèves se préparer eux-mêmes pour leur épreuve. Certains recevaient des vêtements de toutes les époques, des épées, des capes, etc. Tous semblaient enthousiastes à l’idée de partir dans une autre dimension sauf le «Trio Infernal». Elles savaient très bien qu’elles avaient reçu la plus difficile des missions, la plus dangereuse. Alors que le temps avançait cruellement, elles prirent aussi conscience qu’elles pourraient peut-être y rester.